Автор работы: Пользователь скрыл имя, 17 Декабря 2010 в 03:52, контрольная работа
Жизнь Анатолья Франса
Боги Жаждут
Justifiant cette danse de la guillotine par le combat contre le complot visant à réduire à néant les acquis de la Révolution, au milieu de la tourmente révolutionnaire qui traverse Paris, assoiffé insatiable de justice, sa voix servira également à assouvir sa propre vengeance et sa propre haine de ceux qui ne pensent pas comme lui. Il finira par le même instrument de justice qui aura servi jusqu’alors à assouvir sa soif de sang et de terreur.
Le personnage de Maurice Brotteaux est très intéressant. Sans être réactionnaire, cet ancien noble se rend bien compte des problèmes que traverse la Révolution en cette période et trouve ces accusations injustifiées. On peut penser que ce personnage incarne le point de vue de l’auteur.
Gamelin, fils d'un humble parisien. Mais Anatole France a semé dans l'histoire prénatale de son personnage quelques signes funestes : non seulement la rencontre de ses parents a coïncidé avec l'écartèlement de Damiens mais une bousculade sur le Pont-Neuf le jour de l'exécution de Lally a provoqué sa naissance prématurée. Anatole France a en outre doté son héros de quelques bizarreries : sa féminité, par exemple, censée le vouer à une certaine passivité. Dans le couple qu'il formait enfant avec sa sœur, Evariste était la fille. Il restait dans ses jupes, raconte sa mère, tandis que Julie plus audacieuse grimpait aux arbres. A vingt ans, il frappait par sa « beauté à la fois austère et féminine, les traits d'une minerve » (p 43). La « mâle Julie » au contraire est parfaitement crédible en costume d'homme et se révèlera plus tard être un jules.
Car Gamelin n'est pas nul. Ce raté porte en lui une œuvre. Dès les
premières pages du livre, la chose est clairement établie. Deux tableaux
inachevés attirent l'attention dans son atelier. Le premier, monumental
et académique, est un Tyran poursuivi aux Enfers par les Furies.
Il est ridicule voire monstrueux avec ses « figures inachevées et
terribles, plus grandes que nature» et sa «multitude de serpents verts
dardant chacun deux langues aiguës et recourbées».
Anatole France brouille les pistes en proposant une explication
économique du déclin de la peinture sous la Révolution. L'art
français a perdu tous ses «débouchés». Les collectionneurs qui
n'ont pas émigré sont ruinés (comme Brotteaux) et les nouveaux riches,
« acquéreurs de biens nationaux, agioteurs, fournisseurs aux armées,
croupiers du Palais-Royal
» n'achètent pas de tableaux.
Alors à quoi tient son échec ? Est-ce vraiment à son fanatisme révolutionnaire
? Fanatisé, Gamelin « s'est fait inhumain», il est devenu un «
monstre » (c'est le mot de sa mère
et de sa sœur).
Anatole France insiste sur sa froideur, son manque d'imagination, son «irrémédiable chasteté» qui lui interdit d'imaginer par exemple qu'une femme puisse avoir des désirs sexuels. A l'époque où il a conçu et esquissé son tableau, il ignore ce qui s'y joue mais du moins a-t-il trouvé une « forme » pour exprimer ce dont il ne peut être conscient : son clivage intérieur, son amour-haine incestueux pour sa sœur Julie, dont son amante Elodie / Electre ne sera qu'un substitut.
Or Oreste consolé par sa sœur est sans doute nourri de cette ignorance (de cette innocence), que son statut de juré tout-puissant va lui faire perdre en lui donnant l'occasion ou le moyen de ces transgressions par lesquelles, au lieu de se sublimer, le désir s'exaspère. Les jurés, les juges «atroces de vertu ou de peur» sont tous des violeurs en puissance. Il y a celui qui abuse effectivement de Julie en lui promettant le salut de son amant mais il y a tous les autres qui rejouent légalement les Cent-vingt journées sadiennes en faisant exécuter les condamnées dont la mort prochaine les excite. Et c'est auréolé de sang que le juré Gamelin achève de conquérir Elodie.
Les deux amants sont désormais unis par une relation vouée à la répétition et au désastre. France évoque crûment ces nuits où « pressés éperdument l'un contre l'autre, l'amant sanguinaire et la voluptueuse fille se donnaient en silence des baisers furieux ». Et plus loin : « inondée [...] d'horreur et de volupté », elle « l'aimait de toute sa chair, et plus il lui apparaissait terrible, cruel, atroce, plus elle le voyait couvert du sang de ses victimes, plus elle avait faim et soif de lui. ».
A quoi bon peindre désormais ? Ou plutôt avec quoi ? Gamelin
a définitivement troqué son art contre des jouissances perverses qui
le laissent anéanti. Ce n'est plus l'argent qui lui manque à Gamelin,
c'est l'énigme le concernant qui autrefois le poussait à travailler
et qui lui avait fait découvrir, dans l'œuvre d'Euripide, cette pièce
rare, cette scène peu connue.
C’est de Gamelin: le peintre des Dieux ont soif .
Les
dieux ont soif est donc une évocation intemporelle du fanatisme, de
sa séduction comme de sa puissance de mort. Anatole France, qui en
1912 est une grande figure humaniste et socialiste, comprend l’utopie
mais en sait les dangers.
La littérature